Les études : mon stage

Alors voilà, chose promise chose due je vais vous parler de mon stage.

Aujourd’hui, en rentrant chez moi, je me suis endormie sur mon canapé avec ma théïère sur les genoux… A 15h50 !
Je crois que c’est le signe que ce stage est prenant !

Le cadre :

Je suis encadrée par une neuropsychologue, qui exerce au sein d’un SESSAD (Un service d’éducation spéciale et de soins à domicile) et spécifiquement, au sein d’une maison pour les personnes autistes. Le service reçois des enfants à partir de 6 ans et jusqu’à des édultes de 24 ans.
Tou-te-s avec des Troubles du Spectre de l’Autisme. (TSA)

Je ne m’occupe pas des enfants à proprement parler. Mon stage consiste à suivre les activités de la neuropsychologue qui m’encadre. A savoir : Evaluation de l’intensité du spectre autistique, entretien clinique avec les enfants et familles, participations aux réunions d’établissements des projets d’accompagnements des enfants et jeunes adultes, évaluation du fonctionnement cognitif quand nécessaire, etc.

Mon expérience:
C’est très interessant.
Mais au-delà de l’interet, je dirais scolaire, de la chose, c’est une expérience humaine formidable. Pour être au mieux avec les personnes autistes (dans le sens interagir d’une façon qui soit le plus profitable aux deux partie, ou le moins dommageable) cela me demande d’oublier tout de soi, et d’ouvrir tous nos capteurs pour être à leur écoute totalement.
Car, l’une des caractéristiques des TSA, est un trouble, retard voir absence de la communication verbale et non verbale.
Ainsi, pour les personnes dites ordinnaires (comprendre neurotypiques, je trouve cette façon de dire touchante, cela évite l’écueil du normal/anormal et c’est presque valorisant pour les personnes avec TSA) c’est très perturbant, car les repères d’interactions ne sont pas là.

Mais, je vais vous dire, c’est beau.
C’est beau à vivre ce dépouillement, cette mise de côté de soi, de tout nos standards sociaux, pour accueillir l’autre tel-le qu’il/elle est. Juste tel-le qu’il/elle est.
Pour moi cette démarche est un bonheur.

J’avour un peu honteusement que je le vis ainsi : je fais pour eux et elles ce que j’aurais aimé que l’on fasse pour moi. Que l’on tende toutes ces perceptions pour comprendre ce que je ne suis pas capable de dire, et que l’on soit simplement dans l’accueil de ce que je suis, avec tout ce que la société appelle bizareries chez moi.
J’admets que je suis heureuse de le faire pour eux/elles. Même si ce n’est que le temps d’un entretien, d’une interaction courte.
Même si dans cette interaction, je n’existe pas vraument pour certain-es. Peut importe. Ce n’est pas moi qui compte à cet instant, ce n’est pas de moi qu’il s’agit mais d’eux/elles.
Je suis heureuse de m’ouvrir à eux/elles, de les accueillir, les recevoir et les écouter.

Pour autant, c’est un stage très difficile émotionnellement et également nerveusement.
La première semaine, je suis rentrée chez moi mercredi et je me suis effondrée sur le canapé. J’étais épuisée. Vidée, alors que je n’y avais passé qu’une demi-journée le jour-même.
Car même si ces enfants (je suis dans l’unité EPA pour Enfants et Pré-Adolescents) n’ont pas le même langage que nous, ils et elles s’expriment néanmoins. Et leur moyens d’expressions me touchent parfois jusqu’aux tréfonds de ce que je suis.
Quand il n’y a pas de mot, la communication ne passe plus par le conceptuel, et c’est directement l’émotionnel, voir, le cerveau reptilien qui répond.

Ces cris…
Ces cris qui mêlent à la fois frustration, colère, douleur et chagrin. C’est affreux.
D’autant plus que pendant tout ce temps, je sais que je ne suis rien, que je ne peux rien. Et j’entends ce cri qui pénètre chaque parcelle de mon être. Pendant les 15 minutes qu’ont durée la crise que je garde en mémoire et que je vous décris là, j’ai senti ce cri s’insinuer en moi, comme un fluide épais qui s’écoulait lentement mais dont je sentais tout le poids.
Je l’ai senti se coller à mes os.
Ces cris. 15 minutes de cris, pour exprimer sa frustration, sa douleur, sa colère, son chagrin. Tout ça en même temps.
Je me rappelle mon impuissance totale.
Je savais que je ne pouvais rien faire et que, pire (ou mieux, je ne sais pas) je savais que je ne DEVAIS rien faire. Qu’aurais-je fait de toute façon ?
Pour apaiser un enfant autiste en crise, il faut le/la connaître, savoir pourquoi la crise est venue (quand la cause nous est seulement accessible) et savoir ce qui calme l’enfant, ce qui l’apaise, le/la rassure, le/la soulage.
Et moi je ne savais rien de tout cela.

Alors j’ai attendu. Et j’ai entendu.
J’ai entendu ces cris de 15 minutes, sans interruptions si ce n’est celle de la respiration.

Et puis j’ai vu aussi.
J’ai vu des enfants s’auto-mutiler à force de ce qu’on appelle les stéréotypies : des gestes inhabituels répétés.
J’en ai vu avec les ongles arrachés. J’en ai vu avec des plaies au crâne, à force de se jeter la tête contre les murs.

Mais heureusement, j’en ai vu d’autres.
Qui avaient moins ou pas de troubles du comportement, et qui parlaient bien, ou du moins assez pour communiquer avec les autres verbalement.
J’ai vu des sourires de fierté absolue dans la réalisation et la réussite de tâches qui vous semblerait toutes simples, mais qui, réalisées en autonomie totale pour eux/elles, est une victoire immense.

Ce que je garderai de ce stage, c’est avant tout l’enseignement humain.
Car je parle des enfants, mais il y a aussi les parents, les familles, les histoires.
Il y a les tests, les évaluations, les cotations, les diagnostics, les traitements, mais il y a surtout les individus et leurs histoires.
Comment vous dire comme cela m’a ancré encore plus dans cette dimension profondément humaine que je perçois dans l’exercice de la psychologie ?
C’est comme si, en fait, tout le savoir (absolument nécessaire et obligatoire, entendons-nous bien) scientifique et théorique ne prenait tout son sens qu’une fois incarnée dans la dimension humaine des individus et de leurs histoires.

Je crois qu’on peut avoir tout le savoir théorique du monde en psychologie, connaître tout de la recherche et de ses dernières découvertes, tout cela ne prendrait sens que dans la réalité des individus.

Pour mes études :
De ce côté, c’est SU-PER. Mon encadrante est très contente de moi, et m’a rempli une évaluation de stage en OR.
Elle m’a noté A (entre 16 et 20) pour TOUT. Et a fait des observations desquelles je ne suis toujours pas remise. Elle me félicite de mes connaissances théoriques, que j’applique tout à fait pertinemment à son avis. Et souligne chez moi un excellent sens de l’analyse clinique.
Un excellent sens de l’analyse clinique.
C’est le compliment que j’ai le plus apprécié, parce que le sens clinique est quelque chose qui s’acquiert avec la pratique et l’expérience. Il se peaufine au fil du temps et on ne cesse jamais de s’aiguiser.
Alors m’entendre dire que déjà, alors que je débute à peine ma L3, le mien est suffisamment développé pour être utilisé correctement, et être remarqué par une professionnelle qui exerce depuis 15 ans !
WHAHOUUU !
Je n’en peux plus. :p

Je suis, ceci dit, complètement vidée.
Cette dernière semaine s’annonce compliquée, alors que j’écris ces mots en baillant à m’en décrocher la mâchoire.

Vous comprendrez maintenant, j’en suis certaine, mon silence depuis un mois. J’étais simplement prise par mon stage. 😉

Je vous retrouve dès le 3 décembre, parce que je finis le 2 et que je veux dormir un peu avant de vous retrouver. 🙂
Parce que j’ai pleiiiiiiiiiiiiin de choses à vous dire. 😉

 

7 réflexions sur “Les études : mon stage

  1. Thirty-one dit :

    Quel enthousiasme ! C’est chouette.Je suis contente pour toi.Je pense à ces petits patients qui souffrent. J’espère qi’ils bénéficient de techniques et de soins pour retrouver un peu plus de paix. Hâte de savoir ce que tu as à nous dire.Bonne fin de stage.

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  2. R dit :

    Coucou Line,

    J’ai commencé à lire ton blog via un commentaire de cette chère Alexandra sur les tribulations de son petit zèbre, car je suis probablement surdoué comme toi, je passerai les tests dans 1 mois.
    J’aime bien ton style d’écriture, où il n’y a pas beaucoup d’imprécisions (oui, je déteste l’imprécision, au travail, on me qualifie d’original, voire de bizarre, mais bref).
    Comme il y a possibilité que je suis un « twice exceptionnal » (ne m’en veut pas de te voler la vedette de la rareté 😛 ), je suis probablement aussi autiste Asperger, ou autiste de haut niveau si on utilise les termes du DSM-5. Et j’ai de la chance, car les signes cliniques sont plus modérés que les autistes que tu as encadrés probablement.
    J’espère que tu prendras mon commentaire avec bienveillance, car c’est mon but.
    Pour les caractéristiques des TSA, le trouble de la communication verbale se retrouve uniquement chez les autistes du groupe de Kanner, pas ceux du groupe d’Asperger. Par contre, les 2 groupes partagent les troubles non verbaux effectivement. J’avoue ne pas connaître les autres types d’autisme, donc je n’en parlerai pas.
    Je pense que tu n’as pas à avoir honte de vivre cette expérience de manière égoïste, car moi aussi, je le fais (je veux dire, ce n’est pas un argument, mais c’est humain). J’aide certain.e.s autistes de mon entourage, car ces personnes ont des difficultés, et je m’y reconnais étant plus jeune, du coup, je n’ai pas envie qu’elles vivent les mêmes difficultés et rejets que j’ai eu étant plus jeune.
    Et aussi, par rapport aux « vérités » que tu attribues aux personnes surdouées, elles me correspondent en partie, mais une partie ne me correspond pas, probablement du fait de l’autisme. Donc ce que tu disais dans certains billets sont faux, dans le sens où « tous les surdoués présentent ces traits » (du coup, c’est non valable à 100% pour les autistes surdoués).
    Bien que j’ai dit tout ça, ceci n’enlève en rien ton apport enrichissant de ton blog que j’aime beaucoup. Oui, même le côté émotionnel et partial dont tu fais preuve, il faut le dire, puisque tu dis que tu as du mal à accepter certaines parties de toi.

    Merci pour tout !

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    • Line dit :

      Bonjour R.

      Merci à toi pour ton commentaire ici. 🙂

      Oui c’est vrai tu as raison, ce que je disais sur « tous les surdoué•e•s » ne prenait pas en compte les personnes autistes asperger qui sont aussi HPI.
      Et c’est valable pour l’ensemble de ce blog.
      Je connais trop peu de chose sur le spectre autistique pour me permettre d’en parler de quelque façon que ce soit.

      Ceci étant, ton commentaire me fait dire que oui, la clarté de mon discours aurait sans doute gagné à ce que je le précise. :p

      Biensur que je prends ce commentaire avec bienveillance ! Tu me parles de quelque chose dont j’ignore beaucoup de chose, il est normal alors d’écouter et de prendre note.

      Vas-tu aussi passer les tests et bilans qui te permettront de savoir si oui ou non tu t’inscris dans le spectre autistique ?
      L’ADOS 2 est une expérience intéressante à vivre ! Peut-être que, si tu es Asperger (ça se dit comme ça ?) et en plus HPI ça te semblera un peu enfantin mais il n’empêche que c’est un bon outil (je trouve) pour se situer sur le spectre des troubles autistiques.

      Tu ne me voles rien du tout, rassures-toi. ^^

      Encore merci à toi. 🙂

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      • R dit :

        J’irai faire les tests pour l’autisme, mais, l’hôpital ayant un nombre très important de demandes, et que je suis un adulte, les temps d’attente sont très longs (de l’ordre de 3 ans). Apparemment, je passerai le premier rendez-vous (il y en a plusieurs) au minimum début 2018, car, d’après l’hôpital, il y a de grandes chances que je suis positif au test (oui, dans les 10 premiers dossiers et presque 1 an d’attente encore…).
        J’ai consulté une psychiatre, et c’est elle qui m’a suggéré de passer le WAIS-4, car je fais des choses peu communes d’après elle (dire que je fais ces choses naturellement, je n’ai jamais demandé aux autres comment ça se passe dans leurs têtes).
        Oui, on peut dire Asperger tout simplement, ou aspie, sur internet, les gens utilisent ces termes là.
        Je pense que l’ADOS 2 n’est pas enfantin, même en étant HPI, car il y a par exemple le test des masques, où l’on voit uniquement les yeux pour deviner l’intention ou l’émotion des gens, je vais probablement l’échouer (donc le réussir si on voit ça d’un point de vue « je suis autiste »). Par contre, les tests de motricité fine vont probablement être très facile pour moi, ça, ça sera enfantin.
        Je me dis que ça serait intéressant de tenir un blog plus tard, lorsque j’aurai les 2 diagnostics. Mais mes intérêts n’étant pas beaucoup portés sur la psychologie/psychiatrie etc, ça va être difficile de laisser les références d’études sur le potentiel blog que je ferai. Car je tiens à avoir des références de publication, c’est le minimum pour le gage de sérieux.

        C’est un plaisir de converser avec toi.

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        • Line dit :

          Merci R.

          Le plaisir est partagé. 🙂

          Oui malheureusement les délais sont très longs, je sais bien.
          Courage donc et patience alors !

          Oui ce serait surement très interessant de partager via un blog ton expérience et ton parcours de personne « Twice exceptional », et ce serait tout aussi intéressant que tu le fasses même sans références psychologiques ou psychiatrique.
          Sur ce blog, je m’emploie à en fournir un certains nombre, parce que je vais en faire mon métier (de la psychologie). Donc il me semble normal de fournir ces références effectivement pour témoigner du sérieux de ma démarche, en plus de partager des informations qui me semblent bien utiles pour celles et ceux qui s’interessent au sujet du HPI.

          Mais les témoignages « non professionnels » peuvent être tout aussi pertinents. Pour exemple, le blog d’Alexandra Reynaud. Elle n’est pas professionnelle du HPI ou de l’autisme, mais elle est concernée par les deux en tant qu’individu.
          Son témoignage est très apprécié et plébiscité.

          Donc, si tu en as toujours l’envie le moment venu, n’hésite pas. 🙂

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          • R dit :

            Coucou !!!

            Je reviens après avoir passé les tests 🙂
            Sachant que j’ai un QIT hétérogène, mais que, si je me base sur cet article là :
            https://www.talentdifferent.com/q-i-or-not-q-i-lidentification-du-surdon-8-sur-10-differences-intra-individuelles-heterogeneite-des-profils-hp-dans-le-qi-1777.html
            Et suivant ce que m’a dit la psychologue, je suis donc surdoué. Et l’IAG le confirme. De plus, ayant un QIT hétérogène, cela coïndice probablement avec le le syndrome d’Asperger ou TSA, l’hypothèse étant posé aussi par la psychologue. Je vais bientôt aller demander à ma psychiatre pour interpréter les résultats à la lumière de l’autisme. Et aussi, j’ai été reconnu par mes pairs surdoués avant même d’y avoir pensé, et qui m’ont dit que je l’étais, alors que je minimisais ce qu’ils disaient, car je trouvais ça normal pour mon fonctionnement.

            Si tu le souhaites, tu as mon email, on peut continuer en privé si ça t’intéresse, pour avoir plus de détails ou autres.

            Et merci pour ton blog, j’aime beaucoup les articles que tu publies ^^
            Et j’aurai bien voulu venir te voir à Toulouse, mais l’emploi du temps ne me le permettait pas.

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            • Line dit :

              Bonjour R.,
              Ravie de te retrouver ici.
              Félicitations pour la passation de ces tests, et courage pour le reste du parcours diagnostic qu’il reste à faire (pour l’autisme).
              C’est toute une aventure qui a commencée, bravo. 🙂

              J’ai parcouru l’article dont tu as mis le lien, si je comprends bien, les résultats se basent sur les résultats au WISC-R qui est l’ancienne version du test de QI pour les enfants. En parcourant en diagonal je n’ai pas vu s’il y avait des études similaires avec la WAISC-IV, mais ce serait intéressant de savoir. 🙂
              Quoi qu’il en soit je crois que d’attendre les résultats des autres tests diagnostics, notamment pour l’autisme, serait une bonne chose pour pouvoir comprendre au mieux les résultats du test de QI.
              Tu vas avoir de la lecture, c’est ça qui est bien ! :p

              Mon mail est toujours ouvert, évidemment, et ce sera un plaisir d’échanger avec toi si tu le souhaites.

              Merci à toi de lire ce blog, de l’apprécier et de le dire ! 🙂

              Promis, je tâche de refaire des interventions comme celle de Toulouse dès que possible. :p

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